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27 La comtesse SOPHIE VLADIMIROWNA STROGANOFF, 1775 — 1845, fille du prince Vladimir Bo-rissowitch Golitzyne et de la princesse Natalie Petrowna, nee comtesse Tchernycheff, naquit le 11 novembre 1775, et fit la plus grande partie de son education a l'etranger, accompagnant sa mere dans ses voyages en Europe. Elle epousa en 1793 le comte Paul Alexandrowitch Stroganolf (1774—1817), avec lequel elle vint, a la naissance de leur premier fils Alexandre en 1794, se fixer a Petersbourg, et dont l'amitie avec le Grand-Duc Alexandre Pavlowitch mit bientot les jeunes epoux sur un pied d'intimite a la Cour Grand-Ducale. Un moment vint meme ou la seduisante beaute de la comtesse captiva serieusement le Grand-Duc; elle sut pourtant se tirer avec dignite de ce pas difficile sans rien perdre de son amitie et en se conciliant de plus celle de la Grande-Duchesse sa femme, dont l'attachement pour elle dura jusqu'a la mort. Un amour entierement paye de retour pour son mari et ses enfants faisait, avec les tendres soins prodigues a une vieille mere qui l'adorait, toute la vie privee de la comtesse, qui partageait ses loisirs entre la Cour et le monde, d'une part, et, de l'autre, une incessante intimite avec l'Imperatrice Elisabeth. Mais son bonheur domestique subit bientot de cruelles epreuves: atteinte au plus vif de ses sentiments maternels par la mort de son fils Alexandre, tue a la fleur de l'age en 1814 a la bataille de Craonne, elle perdit trois ans plus tard son mari, mort phtisique dans sa 44e annee. Apres avoir reussi, a force d'instances, a partir avec lui pour un voyage par mer a l'etranger, conseille par les medecins, elle eut la douleur, comme il prevoyait sa fin prochaine, de devoir debarquer a Copenhague, pour rentrer par la Suede en Russie, ou elle apprit qu'il etait mort deux jours apres leur separation. En proie a un desespoir qui donna des craintes pour sa vie, elle trouva une puissante consolation dans la rare et chaleureuse amitie de l'Imperatrice Elisabeth. Yeuve avec la jouissance viagere du majorat des Stroganolf, elle partagea le reste de sa vie entre sa propriete de Maryino, pres de Novgorod, et la maison StroganofE a Petersbourg, ou elle recevait non seulement l'elite de la Cour et de la ville, mais encore les plus eminents des hommes de lettres et des artistes. Elle mourut doucement et sans douleur d'une paralysie du c?ur, a l'age de 70 ans, le 5 mars 1845, comme elle achevait sa premiere semaine de devotions de careme. Elle fut inhumee dans l'eglise St-Lazare, au monastere d'Alexandre Newsky; l'Empereur Nicolas et l'Imperatrice sa femme vinrent lui rendre les derniers devoirs. Chose curieuse, sur le pied ou elle etait a la Cour, l'amie de l'Imperatrice n'eut jamais aucune distinction, et, lorsque, en 1806, elle recut le portrait de dame d'honneur, elle le renvoya a l'Empereur en le priant de le conferer plutot a sa mere, la princesse Golitzyne, ce qui fut fait. La comtesse Stroganoil eut un fils, Alexandre (1794—25 fevrier 1814), et quatre filles, Natalie (7 mai 1796—7 octobre 1872), mariee au comte S. Stroganoii, Adelaide (51 decembre 1799 —12 fevrier 1882) au prince B. Golitzyne, Elisabeth au prince I. Saltykoff, et Olga (1er juin 1808 —15 avril 1857) au comte P. Fersen. D'une beaute merveilleuse dans sa jeunesse, celebree dans les vers de Derjavine, la comtesse Stroganolf faisait l'enthousiasme general, tant par ses charmes que par ses „qualites extraordinaires", dit Gretch, „du c?ur et de l'esprit". Dans l'instruction variee recue a l'etranger, le russe avait ete sacrifie, et elle dut s'y mettre serieusement a son retour: elle traduisit meme en russe l'Enfer de Dante. Sur ses vieux jours, toute cassee par l'age, elle ne perdit rien de sa force de caractere ni de sa lucidite et de sa rectitude de jugement, et, par ses convictions religieuses, par ses idees sur le bien de son pays, elle resta toujours telle que la montre sa correspondance: un pur ideal de femme russe. ( D'apres l'original de Vigee-Lebrun, Galerie Stroganolf, St-Petersbourg.)